Les caractéristiques révélées en étudiant l’activité de funboarders experts font apparaître que les conceptions intuitives et empiriques de l’entraînement sont particulièrement réductrices. Mon objectif était de recréer à l’entraînement les conditions de la compétition, afin de développer à la fois des compétences techniques situées, au regard des contraintes et du déroulement de la manche, et des compétences tactiques liées à l’environnement, aux adversaires et aux juges. Pour cela, je complétais une formation physique et technique par un entraînement tactique autour de trois axes :
(1) développement de stratégies d’optimisation de l’espace et du temps,
(2) développement d’une activité exploratoire au cours de la manche,
(3) développement de compétences sociales vis à vis des juges et des adversaires.
1. Développement de stratégies d’optimisation du temps et de l’espace
a) L’organisation temporelle
Par des situations spécifiques, l’entraîneur cherche à développer chez le funboarder des compétences d’organisation temporelle, l’inciter à construire un « plan ressource » et à affiner le rapport entre la structuration tactique d’une manche et l’environnement. Les situations proposées permettent aux coureurs de tester différentes formes d’organisation et de les valider pour chaque type de conditions de navigation. Cette planification n’est pas rigide, elle rend compte de l’activité du rider de façon vague et partielle dans la mesure où elle ne précise pas de contenus exécutables (ce n’est pas un plan rigide et précis). Ces contenus se définissent ensuite dans l’action, le plan donne une orientation et laisse part à l’improvisation, car les caractéristiques de l’environnement in situ peuvent guider la sélection de l’action et rendre inadaptée la planification prévue. Les organisations testées se confirment performantes lorsque le funboarder réalise un programme complet.
Exemple de situations:
- Enchaînement de séquences de 10 minutes avec retour à terre entre séquences pour nouvelle consigne: « Effectuer 3 surfs et 3 sauts en commençant par les surfs » ; « idem mais en commençant par les sauts »; « idem mais en alternant surfs et sauts »; « idem libre »
Les critères de réussite sont la réalisation du programme, le respect de la consigne, le comportement du rider en fonction de la consigne (ex: arrêt en haut du spot pour attendre une vague, jibe pour se replacer rapidement en bas du spot parce qu’il n’y a pas de série pour effectuer un beau saut…)
Discussion sur les stratégies performantes en fonction des conditions du jour (orientation du vent par rapport aux vagues, force du vent, taille et fréquence des séries…)
Autres exemples de situations d’entraînement:
- Heat de 10 minutes: « effectuer deux sauts dans les 2 premières minutes »
- Heat de 10 minutes: « effectuer deux surfs dans les 2 premières minutes »
Le rider doit adopter une circulation particulière sur l’espace défini qui lui permette d’être performant et de trouver rapidement de quoi répondre à la consigne.
b) L’aménagement de l’espace de navigation
Le funboarder effectue un découpage de l’espace de navigation en un certain nombre de zones : zones de danger (shore break, mousses), d’évolution (vagues déferlantes), de sécurité (zone au-dessus de la zone d’évolution où les vagues sont encore sous la forme de houle). Elles sont associées à des possibles en terme de figures et de prise de risque. L’entraînement peut aider au développement des compétences d’observation, de positionnement et d’action en liaison avec ces zones particulières de l’espace global de navigation. Il incite le funboarder à ne pas se limiter à répondre ou à saisir les opportunités qui se présentent, mais à structurer un espace « praticable » en fonction de son engagement dans la situation. L’entraîneur, en créant des situations à circulations contraintes, permet au funboarder de se situer précisément sur le plan d’eau, de faire le lien entre prise de risque et configurations de vague afin d’optimiser son temps de navigation.
Exemple de situations d’entraînement:
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Heat de 10 minutes: « Pendant les 5 premières minutes, ne pas rentrer dans la zone de shore break, sortir de la vague en surf avant la zone de shore break »
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Heat de 10 minutes: « Rester dans la zone d’évolution pendant tout le heat » (oblige donc à jiber dans la vague en haut du spot, et à sortir du surf avant que la vague ne ferme. Situation très physique, adapter le temps en fonction du niveau des coureurs).
Les parties 2 et 3 à suivre dans prochains articles: Développement d’une activité exploratoire au cours de la manche et développement de compétences sociales vis à vis des juges et des adversaires.
