Houla ! tu commences à te creuser les méninges !
Lors de ta dernière nav, tu as proposé à Albert : « cette fois plutôt que de raturer le spot avec des bords de travers, si on se faisait une visite du coin ? » Alors là, je te dis bravo, le windsurf c’est aussi un engin de locomotion, alors autant s’en servir pour se locomoter.
Albert ok, vous voilà partis pour une expédition autour du spot en prenant bien soin, puisque vous êtes des mecs raisonnables…, de prendre de l’eau et le matériel de sécurité obligatoire… en disant ça… ça me rappelle mes cours de maths lorsque le prof demandait « c’est bon c’est compris ? » et personne ne mouftait pour ne pas risquer de passer pour un con… bref, je vais quand même faire un petit rappel à la loi, on ne sait jamais, tu connais mon goût pour son respect…
Navigation à moins 2 milles d’un abri
« 1. Une aide à la flottabilité d’une capacité minimale de 50 N ou une combinaison ou un équipement de protection conforme aux dispositions de l’article 240-2.13, s’il (elle) est porté (e) en permanence ;
« 2. Un moyen de repérage lumineux individuel, étanche, ayant une autonomie d’au moins 6 heures, de type lampe flash, lampe torche ou cyalume, à condition que ce dispositif soit assujetti à chaque équipement individuel de flottabilité ou porté effectivement par chaque personne à bord.
Tu crois que je n’ai pas lu dans ton cerveau… « ah bon il faut une lampe ? je ne fais pas de la spéléo ! » ben oui…
« Art. 240-2.13.-Caractéristiques des combinaisons ou équipements de protection.
« Les combinaisons ou équipements de protection répondent aux caractéristiques suivantes :
«-lorsqu’ils sont utilisés jusqu’à 2 milles d’un abri : combinaison humide en néoprène ou sèche assurant au minimum une protection du torse et de l’abdomen, une flottabilité positive et une protection thermique »
Evideeeemmmment tout le monde navigue toujours à moins de 2 milles des côtes, et l’été avec 40 degrés à l’ombre tout le monde navigue évideeeeeeeemmmment avec une combinaison…
Donc te voilà équipé avec le matos de sécu… ah merde les piles pour la lampe ! Discretos tu piques celles de l’appareil photo de ta belle-mère… oui elle a encore un appareil à piles ta belle-mère…
Alors le parcours : « on se fait un bon bord de travers pour sortir de la baie et ensuite on remonte au près jusqu’à l’île et après on se tape une descente full speed pour revenir ! ok ? oui ! GO ! Matos utilisé : une grosse board de slalom et une voile de 9m².
Le bord de travers c’est du pur bonheur ! Ça plane nickel, et tu te dis que tu es mieux là qu’à l’usine… La sortie de la baie arrive rapidement et il va falloir tirer des bords parce que le mec qui a positionné la petite île l’a mise pile dans l’axe du vent à environ 2 milles de la sortie de la baie. Et comme ils n’ont pas encore inventé le télésiège pour windsurf, il va falloir se cogner la remontée au vent. C’est sympa de naviguer avec Albert vous avez à peu près la même vitesse, mais là, au près tu décides de caper comme un goret, tu ne peux pas t’empêcher d’avoir ta petite idée derrière la tête : « Je vais lui mettre la dose, je vais arriver le premier à l’île ! » Tu culpabilises un peu, parce qu’Albert c’est ton pote… Alors là je t’arrête tout de suite ! Sache que tu es normal, ce genre de comportement fait partie des réflexes primitifs du funboarder. En effet, la nutrition, la reproduction, la Windguruvision et la jarriveavantion sont les bases primitives de la motivation de l’homofunboardus. Donc ne t’inquiète pas tu es normal. Et donc pour satisfaire tes besoins primitifs, tu te dis je vais donc caper comme un goret ! Et ça marche ! Tu es même un peu inquiet pour Albert tellement la différence d’angle est nette. « C’est pas possible, il n’a pas trouvé le manuel ou quoi !? » Mais bon l’esprit de compétition reprend vite le dessus au moment où l’espace d’un instant de faiblesse, tu t’es dit je vais abattre un peu… ah non ! « héhéhé qu’est-ce que je vais lui mettre ! » Ça fait maintenant quelques minutes que vous naviguez au près, l’île est bien derrière ton dos depuis un moment et Albert tu le vois plus tellement il est loin, caché par ta voile ! Il va bientôt falloir que je vire, tu te dis. Et là, d’un coup, comme par magie, tu vois ton Albert qui croise 50 m au-dessus de toi, peinard, déjà sous l’autre amure !! Tu n’en crois pas tes yeux !! Ce n’est pas possible, je faisais 10 degrés de mieux que lui en cap !!!! C’était limite gênant tellement je remontais bien, tellement bien que tu te voyais déjà monter sur le podium et recevoir le prix Otis (tape Otis sur Google si tu saisis pas…). Comme ça t’énerve, alors tu te mets à caper encore plus ! Mais rien y fait Albert recroise toujours plus haut ! Arrrrrrr ! P…. c’est pas vrai !! je vais pas me faire battre par un papi ! Hé !! Doucement ! N’oublie pas qu’Albert c’est ton pote !!! ah oui j’ai oublié de dire qu’Albert est plus vieux et qu’il a fait un peu de régate en 420 et quand il a commencé la planche il a arrêté le 420…
Ce qui devait arriver arriva, Albert se retrouve à t’attendre à l’île pour faire la redescente avec toi… tu dis rien, enfin juste, « font chier ces algues… ».
Le soir au resto en famille tu n’y es pas, ton esprit est ailleurs… « Chéri, ça va pas ? » Évidemment tu ne vas pas dire à ta femme que ce vieux con d’Albert t’a mis une raclée… « non ça va, tu sais… tu peux pas comprendre, quand tu vis une aventure au large, c’est toujours difficile de reprendre une vie de terrien normal… ». « Oh mon héros ! » te lance-t-elle amoureusement. Après avoir consommé les émoluments que réserve la femme à son héros (« Voilà un truc qu’Albert n’aura pas gagné… »), tu n’arrives pas à fermer l’œil. Tu tournes et vires, tu rejoues les trajectoires, tu n’as pas rêvé, tu faisais 10 degrés de plus que lui !!
De retour sur ta flaque, tu te dis qu’il faut que tu en parles à Produspot, « comme c’est un pro du spot, il saura sûrement me dire. » Tu prends ton courage à deux mains et tu te lances :
- Monsieur Produspot, est-ce que je peux me permettre une question ?
- Oui je t’écoute jeune padawan. Tu n’avais jamais trop remarqué, mais il brille ! La lueur de l’Élu des dieux du spot !!
- Voilà j’ai un pote qui m’a raconté qu’un jour il se tirait la bourre avec un pote à lui et tu sais pas quoi ? eh ben je… euh… il faisait un meilleur cap que lui à en être insolent ! et ben tu sais quoi ? c’est Alb… euh son pote qui est arrivé quand même en premier à l’île !!! c’est fou cette histoire ! non ? comment c’est possible ?»
Gros silence. Produspot ferme les yeux et entre en connexion avec l’esprit des dieux. Il demande de la place autour de lui, c’est beau ! Le temps s’arrête, les foils ne chantent plus, les oiseaux ne planent plus, même les X9 ne cassent plus… Le silence divin s’interrompt lorsque Produspot en finit de sa recherche dans l’espace caverneux de son cerveau bineuronale :
« Mon enfant, eh bien c’est ce que l’on appelle la VMG. » Te répond-il avant de s’en retourner en lévitation vers son activité principale : méditer le spot, les mains sur sa boucle de harnais.
Ouah ! Tu es scotché une fois de plus ! Mais VMG c’est quoi ? Une organisation humanitaire ?
- Euh… Monsieur Produspot ? c’est quoi la Vé M Gé?
- Je t’expliquerai quand tu seras plus grand…
Et tu restes là les bras le long du corps mais tu sais qu’il a raison Produspot, chaque chose en son temps. Tu es quand même déçu, tellement déçu que tu n’as plus le goût d’aller à l’eau aujourd’hui ! Eh oh il faut te reprendre, le parcours du funboarder n’est pas le chemin d’un long bord tranquille, faut se battre, faut en vouloir !! Accroche-toi ! Alors retourne à l’eau et à ton retour je t’aurai fait un petit schéma avec deux ou trois explications pour comprendre le principe.

VMG : « Velocity Made Good ». Optimiser son gain au vent (au près), sous le vent (au portant), en jouant sur le rapport cap/vitesse. Au près, plus on cape, plus la vitesse diminue. Si on abat de quelques degrés, la vitesse augmente; donc pour une même durée de navigation, la distance parcourue augmente. Du coup, il faut trouver le bon compromis qui fait que ce que l’on perd en cap, on le gagne en distance grâce à la vitesse augmentée. Cette distance parcourue peut permettre du gain au vent par rapport à l’allure plus serrée mais moins rapide… comme un schéma vaut plus qu’un long discours comme disait Mr Lautre:
Le rouge (Albert) fait moins de cap, il parcourt plus de distance mais va bien plus vite que bleu. Pour chaque moment numéroté il a gagné un peu plus au vent… On dira que sa VMG, son rapport cap/vitesse, est plus performante que bleu… Donc ce n’est pas forcément celui qui cape le plus qui arrive en tête à la bouée au vent ou à l’île au vent. A noter que chaque engin à voile a ses propres performances en fonction de son cap dans les différentes conditions de vent, ce sont les « polaires de vitesses », diagrammes qui présentent les performances de vitesse en fonction de l’allure. Il permet de choisir l’angle le plus favorable en terme de rapport cap/vitesse (VMG).
N’hésite pas à partager pour en faire profiter tes potes, même si c’est leur donner des éléments pour être plus performants, mais tu n’es pas comme ça…! merci 😉 Et des commentaires si tu as des remarques, des questions, pour aller plus loin! N’hésitez pas à liker, à partager l’article, ça encourage à en faire d’autres 😉 et à me suivre sur Instagram https://www.instagram.com/stephanekrause
Toujours aussi fan. Merci Stéph. Encore
Merci Eric c’est sympa!!
Top !
C’est quoi environ le cap optimal par rapport au vent en Slalom ? 35/40 ° ?
Bravo Steph!!!C’est juste paaaarfait!!!j’adore!!!je partage avec mes chouchoux!!!
Merci Tristan!
Ok, mais moi je n’arrive pas vraiment à remonter au vent avec ma planche de slalom (roundtail) et ma voile de freerace, alors que mes compères et leur voile de race et leur planche de vitesse, ils ont un cap de fou…. avec un vitesse tout à fait honorable qui fait que de toute manière je suis loin derrière et en plus sous le vent….grrrr…
Il est où le truc? Aileron sensiblement équivalent, voir plus court sur leur planche de vitesse (pintail).
Sinon, je comprends l’idée…
A-t-on des polaires comparatives entre planches et voiles à niveau du pilote et aileron équivalent?
Salut François, désolé pour ma réponse tardive! oui la performance au près dépend évidemment du matériel utilisé et du niveau du pratiquant. Et effectivement aussi, si le matériel est le même, du niveau du pratiquant et de son choix en matière de VMG comme je le suggère dans l’article. Les polaires sont liées à un type de matériel. Une fois réalisées par un bon pratiquant, elles peuvent se comparer entre les différents types de matos.
Bonne année 2018!
Ce qui me surprend, c’est que je pensais qu’une planche de slalom (Carbon Art 70cm) remonterait mieux qu’une planche de vitesse (CA SP 66cm)….
N’ayant pas les deux, je ne peux pas faire l’essai avec la même voile….et mes compères sont en voile de course…d’où ma question est-ce que la voile de course (fourreau large 4cam) a une polaire moyenne plus capable au près qu’une voile de freerace (3cam)? Je veux dire significativement meilleure… ou c’est juste moi qui suis pas bon au près?
Oui la voile de course (4 cam) doit permettre de mieux remonter au vent à condition qu’elle soit bien réglée!